Vous êtes tout de même impliqués dans la construction d’un port en Allemagne. En quoi est-ce utile?
Nous contribuons à un grand nombre de projets européens majeurs. Cela fait désormais partie de nos spécialités. Et dans les décennies à venir, nous participerons aussi à de grands projets d’infrastructure en Suisse! Prenez l’approvisionnement en eau par exemple: les réseaux de distribution ont pour la plupart une centaine d’années. Il faudra donc bientôt les renouveler et les réaménager.
Mais acheter tant d’entreprises en si peu de temps comporte aussi des risques.
En effet, il s’agit de petites et moyennes entreprises dont nous n’avons aucune garantie qu’elles réussissent toutes. Mais la diversification à la fois thématique et géographique nous a permis de répartir les risques de manière stratégique. Nous n’achetons pas au hasard, mais poursuivons depuis 5 ans une stratégie des plus claires. Sur 5000 de nos employés, 3500 travaillent ainsi déjà dans le secteur des services.
Comment pouvez-vous diriger un groupe avec autant de cultures et d’orientations différentes?
Nous avons un dénominateur commun, qui est la thématique des infrastructures. Il y a quelques années, nous avons commencé par de petites acquisitions, alors que nous n’avions aucune expérience en matière de rachat et d’intégration. Mais nous apprenons tous les jours, l’important étant de maintenir une culture ouverte et fédératrice. Nous devons non seulement échanger, mais aussi partager nos connaissances ainsi que nos questionnements. Il faut par ailleurs faire de la place à la nouveauté, tout en appréciant les acquis à leur juste valeur. BKW a toujours été une entreprise bien positionnée et prospère! Nous misons sur la force, pas le glamour.
Vous avez entamé la rénovation de votre siège, un bâtiment bernois historique en grès. On y trouve désormais beaucoup de couleurs, d’espaces ouverts et de zones de réunion. Comment ces changements ont-ils été accueillis?
Ces transformations symbolisent la culture du partage et de l’échange. Il m’arrive moi-même régulièrement de travailler directement à la grande table de la réception ou dans les espaces communs. Cela favorise les rencontres souvent inattendues et la naissance de nouvelles idées par le dialogue. C’est exactement ce que nous voulons.
Pourriez-vous décrire votre style de leadership.
Je suis pour la définition d’un objectif commun et je m’investis énormément dans ce sens. C’est souvent à la direction qu’échoit le rôle de tracer la voie pour y parvenir. Sinon, je dirais que je ne suis pas une Madame-je-sais-tout. Enfin, la plupart du temps (rires).
BKW fait des essais avec des maisons autonomes qui produisent autant d’électricité qu’elles en consomment. Quelle est leur utilité?
On peut en effet se demander s’il est utile que chaque foyer produise sa propre énergie, puisque, par précaution, chaque maison doit tout de même être reliée à un réseau. Et maintenir toute l’infrastructure d’un réseau simplement «au cas où» n’est ni efficient ni utile. Mais, encore une fois, ce qui nous intéresse, ce sont les possibilités et le savoir-faire.
BKW produit principalement de l’électricité d’origine hydraulique. Or, les prix de l’électricité sont au plus bas et l’énergie hydraulique ne peut plus être concurrentielle à cause de son coût de production. Allez-vous, comme d’autres entreprises, demander des subventions pour sauver l’hydroélectricité?
Je pense que les subventions ne sont plus la solution. C’est pourquoi BKW ne compte pas en demander. Ce n’est pas l’hydroélectricité qui doit être sauvée, mais éventuellement les entreprises. Les prix sont si bas, parce que l’électricité issue du charbon et du gaz coûte très peu. Cela s’explique par deux facteurs: d’une part, le négoce des certificats CO2 n’est pas vraiment florissant, et, d’autre part, il n’y a aucune conséquence pour les producteurs d’électricité qui polluent pour en créer. Il serait plus approprié d’être taxé en fonction des coûts extérieurs occasionnés par chacun.
La compagnie d’électricité Alpiq prévoit de vendre des parties de son parc de centrales hydrauliques. C’est ni plus ni moins le bradage du sol national!
Je ne vois pas les choses ainsi. Qu’une centrale hydraulique appartienne à une entreprise étrangère ne change rien au fait que l’électricité soit produite en Suisse et que la centrale reste dans le pays.
Que faites-vous pour votre propre bilan énergétique?
Je ne me prépare pas au marathon, je cours assez dans mon métier. Je fais du yoga, mais j’avoue que je suis devenue un peu paresseuse. J’étais bien plus active quand mes filles étaient petites.